Au sein de l’ACT on accompagne les personnes et on leur propose de faire la part des choses entre ce qui provient des 5 sens et les éléments issus de la pensée.
On leur apprend à identifier lorsqu’ils sont en réaction émotionnelle et comportementale vis-à-vis d’une histoire qu’ils se racontent.
Au fur et à mesure, le patient expérimente que le cerveau ne dit pas toujours la vérité et que dans son « blabla » il est important de trier les informations et de ne pas tout acheter comptant.
Pour ce faire de multiples outils sont mis à sa disposition (tels que la mindfulness, la défusion, l’acceptation…) afin de lui permettre de se centrer à nouveau sur le moment présent et ses valeurs pour s’engager dans une vie riche et pleine de sens.
On lui permet de sortir d’une histoire de lutte pour se plonger dans un engagement et dans des actions en accord avec ce qui compte réellement pour lui.
Dans la thérapie narrative on passera d’une histoire bloquante et douloureuse à un scénario motivant, flexible et évolutif.
Dans cette optique, le patient pourra utiliser des processus tels que l’extériorisation du symptôme (une sorte de défusion), la re-narration, l’exception à la règle et la cérémonie définitionnelle.
Les points communs, tout comme les différences entre ces deux approches ont attiré ma curiosité et ont développé l’envie de partager avec vous plus qu’un courant thérapeutique : une manière de voir et d’entrevoir la réalité qui nous entoure.
Au début, a tout début, il y a une rencontre…
Il y a quelques années, intrigué par ce nom très parlant pour moi et enthousiasmé par le descriptif de Nicolas De Beer, je me rendis à Paris à la rencontre des thérapies narratives.
Formé en systémique Brève et en TCC, je me rendais sur place curieux et partiellement sceptique. La rencontre fut (est encore) enrichissante, humaine, foisonnante,… J’y ai découvert un mode d’intervention thérapeutique mais aussi d’une certaine vision sur le monde.
Ensuite, un peu à l’instar d’un retour de vacances, j’ai désiré partager ce que j’ai découvert, et vous faire vivre également cette belle et intéressante rencontre …
Venez et accompagnez moi dans la découverte de cette intervention, de ce positionnement et des philosophies profondément humaines qui la sous-tend cette efficace approche.
Les thérapies narratives en bref
La thérapie narrative est le petit dernier du courant des thérapies brèves qui inclut la thérapie orientée vers les solutions.
Il s’agit d’une approche innovante à bien des points de vue qui a vu le jour en Australie.
L’instigateur et inventeur de ce courant est le psychologue Michael White.
L’approche narrative est une approche de la relation d’aide qui prône le respect et le non jugement.
Elle fait le distinguo entre les problèmes et les personnes. Elle considère que chacun possède de nombreux compétences, talents, valeurs, croyances, engagements et aptitudes qui seront aidant pour réduire l’influence des problèmes dans sa vie.
L’approche narrative est connue pour ses entretiens de « ré-écriture » ou de « re-narration ». Ainsi que le suggèrent ces formulations, les histoires sont au centre des pratiques narratives.
La thérapie narrative et le langage, une longue et belle histoire
Au début des années 1980, au travers du développement du mouvement post-moderne, la psychologie s’orientait présentement vers une approche encore plus globale, prenant en considération l’influence de la culture, l’environnement spécifique des individus et la relativisation des perspectives. De nouvelles questions préoccupaient de nombreux psychologues, telles que:
- Si une personne vivait dans une société dénuée de concept de classe ou de race, en quoi serait-elle différente?
- Puisque chaque personne est influencée par sa propre expérience, comment le thérapeute peut-il aider son client à se diriger vers ce qui lui convient le mieux et éviter de lui imposer ses propres valeurs?
- Que peut-il arriver si le thérapeute aide son client à développer son potentiel et se concentre sur son bien-être, au lieu de traiter une pathologie ? Et s’il n’y avait pas de pathologie ?
- Qui décide ce qui est normal et ce qui ne l’est pas ? Et si les critères de la normalité sont erronés ?
- Si une personne est sûre d’elle dans une circonstance donnée mais timide en une autre, qui est-elle vraiment ?
Interloqué par ce genre de questions et captivé par les travaux de Michel Foucault et de Gregory Bateson, Michael White, avec le concours de David Epston, élabora une approche clinique innovante : la “thérapie narrative”. Cette forme de thérapie acquit ses lettres de noblesse progressivement en raison de ses résultats rapides et efficaces, de son intérêt pour les récits personnels, ainsi que son accent sur l’expertise individuelle de chaque client.
Le langage et l’usage que l’on en fait sont des acteurs primordiaux dans le façonnage et la construction de nos vies.
Au sein des thérapies narratives, on complète et on aborde notre identité qui est constamment créée par la relation avec les autres, les institutions,…à partir de nombreuses histoires parfois contradictoires.
La thérapie narrative organise le monde de l’expérience en termes d’histoire et la tâche du praticien narratif consiste à poser des questions sur ces histoires, à mettre en exergue l’exception,à renforcer les comportements qui vont lui permettre de construire cette nouvelle histoire. Pour ce faire, des cartes ont été mis ont point qui guident le thérapeute au pays de l’histoire, du questionnement spécifique, de l’externalisation, les cérémonies définitionnelle, les conversations constructives,…
Histoire des pratiques narratives
La thérapie narrative est issue des travaux de Michael WHITE et de David EPSTON dans les années 80-90.
Michael WHITE (1949-2008) était un travailleur social en Australie du Sud. Il a animé de nombreux séminaires à travers le monde (Amérique du Nord, centrale, Sud – Asie, Afrique – et, Scandinavie, Grande Bretagne).
Cet homme passionné et passionnant a écrit de nombreux livres dont deux sont traduits et publiés en français « Les moyens narratifs au service de la thérapie » et « Cartes des Pratiques Narratives ». (Editions SATAS)
Au cours de sa carrière, il a, à de nombreuses reprises, travaillé avec les familles, les couples, les individus dans son centre d’Adélaïde. M.W. était également très actif au niveau de minorités et a consacré une grande partie de son temps aux communautés (aborigènes, indiennes…).
Dans son parcours riche, il a endossé le rôle de négociateur lors de la crise des 3 nations à Toronto en 2006…
En 2008, il créé avec Maggie CAREY, Rob HALL son nouveau centre : « Narrative Practices Adelaide » .
Michael WHITE portait un intérêt particulier pour toutes les formes de recueil d’informations qui permettaient aux gens de faire de nouvelles compréhensions des événements de leur vie, de devenir curieux au sujet d’aspects de leur vie restés cachés, de devenir fascinés par les territoires négligés de leur identité, et parfois, stupéfaits par leurs propres réponses aux situations difficiles de leur existence.
Il a créé, d’une certaine façon, un accompagnement socio-politique
Elle s’inspire entre autres :de philosophes français tels Gilles Deleuze, Jacques Derrida, Michel Foucault, Gaston Bachelard, Paul Ricoeur, de psychologues et pédagogues comme Lev Vygotski, Jerome Bruner, Karl Tomm, d’anthropologues tels Gregory Bateson, Cliford Geertz, Barbara Myerhoff, et aussi des sociologues Charles Taylor, Pierre Bourdieu,
Et aussi de Marcel Proust…
Toutes ces hommes avaient la spécificité et comme point commun de prôner « la distinction », « la différence », « la richesse des descriptions », « l’exception », et de critiquer la partie de la pensée moderne imposant la conformité, le diagnostic, la quête de la vérité, l’objectivité, l’universalisme…
En séance, Michael White accompagnait et questionnait le patient afin de l’amener à s’approprier un nouveau récit dégagé de l’histoire qui s’imposait à elles, à se déclarer autorisées à ré-entrer dans la société par la porte de la différence, extraites de la pression normative, sous-tendue par leur identité narrative : leurs intentions, espoirs, rêves, croyances, principes de vie, engagements.
La thérapie narrative en séance, principes généraux
Nous commencerons par aborder quelques notions fondamentales qui composent le modèle et le sous-tendent :
- La vie est conçue comme une narration
- Une conception littéraire de l’identité
- Une compréhension des problèmes et de leurs effets dans la vie des gens comme le produit d’une relation de domination culturelle
- Une conduite des conversations qui donne aux clients/patients le statut d’auteur principal
- Une relation avec les patients fondée sur la collaboration
- Une méthodologie d’intervention issue des théories de l’apprentissage
- Une dimension éthique et politique
Les personnes qui viennent et poussent la porte d’un thérapeute narratif sont placées et abordées comme les experts de leur propre vie et c’est avec respect que le praticien va engager une conversation déculpabilisante qui pose la personne au centre de la relation.?
Cette approche considère que les problèmes sont situés à l’extérieur des personnes comme des personnages avec qui les personnes seraient en interaction contraignante. En séance, le thérapeute initie un travail d’externalisation.
De plus, tout un chacun possède des compétences, des valeurs, des croyances, des engagements, une ?éthique qui le rendent capable de réduire l’influence des problèmes sur sa vie.
Pour mettre en branle les pratiques narratives, le praticien s’installe face au patient et se maintient, tel un journaliste d’investigation, en état de curiosité. Pour promouvoir une collaboration sincère, il fait preuve d’honnêteté et d’authenticité.
Se lancer dans les méandres de la conversation narrative c’est initier un voyage sur des chemins qui sont nous sont inconnus, emprunter des routes nombreuses, s’arrêter à des croisements et des carrefours nombreux qui donnent sur des voies qu’il faut choisir sans toujours savoir quelle en est la finalité.
A chaque pas, une nouvelle passage peut se présenter et de nouvelles possibilités s’ouvrir. On traverse des paysages inconnus on croise des territoires inexplorés. Que va-t-on découvrir, où va-t-on atterrir ?
Heureusement, nous avons avec nous de bonnes cartes pour explorer ce continent vierge et inconnu.
Et c’est dans cette aventure passionnante que nous vous proposons d’embarquer en suivant Nicolas De Beer et Isabelle Laplante.
Dans le prochain article, nous aborderons quelques uns des outils, questionnement et approches utilisés en thérapie narrative tels que
- La métaphore littéraire
- Le re-narration
- Le travail de recherche du lecteu
- L’extériorisation
- Les cérémonies définitionnelles
Nous explorerons également les thérapies narratives sous la loupe de la matrice ACT.
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